1Version remaniée par D. Delahaye
Il suffit de faire le pont
C’est tout de suite l’aventure
Accroch’ toi bien à ton jupon
J’ t’ emmèn’ devant la préfecture
L’air est trouble au printemps fleuri
Jetons mes pavés, tes coquetelles
Et légers comme des cabris
Courons devant les hirondelles
Pi Pin Pon ! les sirènes sonnent
En l’honneur de notre bonheur
Pon Pin Pi ! faut l’ dire à personne
J’ai croché la patte au siffleur.
Laisse-moi tenir ton jupon
Courons, guillerett’, guilleret
Il suffit de faire le pont
Et c’est le royaum’ des troquets
Entre tout’s les bouff’s que voici
Je devin’ cell’ que tu invites
C’est pas l’ cassoulet, Dieu merci
Ni l’ couscous, mais le steak aux frites
J’en vois un stand sur la riv’ gauche
Sa bell’ viand’ est ros’ comm’ tes joues
Fais le guet pendant qu’ je la fauche
“Je n’ai jamais baisé que vous !”
Il suffit de trois petits cons
C’est tout de suit’ la débandade
Laisse-moi tenir ton jupon
J’ saurai nous sortir d’ la panade
J’ai croché la patte au condé
Pour lui fair’ chanter une aubade
Lors, ma mie, les fess’s au danger
Faisons mille et une gambades.
Ton pied frappe et frappe la rue
Si l’étron d’un chien s’y attache
Ne pleure pas, ma mie qui pue :
Je te l’enlève sur une bâche
On n’a plus qu’aller nous cacher
On peut s’aimer comm’ bon nous semble
Et tant mieux si c’est un péché :
Nous allons à Denfert ensemble !
Il suffit de faire le pont
Laisse-moi tenir ton jupon
Il suffit de faire le pont
Laisse-moi tenir ton jupon.
D. Delahaye, 2004
Version originale: Il suffit de passer le pont
Il suffit de passer le pont
C’est tout de suite l’aventure
Laisse-moi tenir ton jupon
J’t’emmène visiter la nature
L’herbe est douce à Pâques fleuri’s…
Jetons mes sabots, tes galoches
Et, légers comme des cabris
Courons après les sons de cloches
Din din don ! les matines sonnent
En l’honneur de notre bonheur
Ding ding dong ! faut l’dire à personne :
J’ai graissé la patte au sonneur
Laisse-moi tenir ton jupon
Courons, guilleret, guillerette
Il suffit de passer le pont
Et c’est le royaume des fleurettes
Entre toutes les belles que voici
Je devine celle que tu préfères
C’est pas l’coquelicot, Dieu merci !
Ni le coucou, mais la primevère
J’en vois une blottie sous les feuilles
Elle est en velours comme tes joues
Fais le guet pendant qu’je la cueille
“Je n’ai jamais aimé que vous !”
Il suffit de trois petits bonds
C’est tout de suite la tarantelle
Laisse-moi tenir ton jupon
J’saurai ménager tes dentelles
J’ai graissé la patte au berger
Pour lui faire jouer une aubade
‘Lors, ma mie, sans croire au danger
Faisons mille et une gambades
Ton pied frappe et frappe la mousse
Si l’chardon s’y pique dedans
Ne pleure pas, ma mie qui souffre :
Je te l’enlève avec les dents
On n’a plus rien à se cacher
On peut s’aimer comme bon nous semble
Et tant mieux si c’est un péché :
Nous irons en enfer ensemble !
Il suffit de passer le pont
Laisse-moi tenir ton jupon
Il suffit de passer le pont
Laisse-moi tenir ton jupon
G. Brassens, 1952
- Avec tout le respect que je lui dois, le ton mièvre et champêtre de l’original s’inscrit plutôt en faux dans la bouche de son parisien d’auteur; j’ai donc pris malin plaisir à faire cette refonte en parigot. ↩︎
I (1952)
La mauvaise réputation Bad Rep
Le fossoyeur Gravedigger
Le gorille The Gorilla
Ballade des dames du temps jadis
Le parapluie The Umbrella
La marine L’amour marin
Corne d’Aurochs Beefalo Bill
Il suffit de passer le pont